Hier soir, j’ai publié le texte suivant sur Facebook, assorti d’un lien vers la chanson “Tous les cris les S.O.S.” de Daniel Balavoine:
Craquage nerveux total. Trop de café pour tenir la journée? Je me suis allongé pour la quatrième sieste de la journée et là… Crise de tremblements et de larmes. Car ma douleur n’est pas seulement psychologique, elle est aussi physique. Chaque jour je me sens un peu plus dramatiquement faible, souffrant, épuisé. Lorsque je sors dans la rue, je vois des personnes du troisième âge me doubler. Après les idées suicidaires au début de l’automne, la paranoïa ces deux dernières semaines, me voici parti dans le domaine de l’hypochondrie — je m’imagine atteint d’un cancer et mourir avant la cinquantaine; je me vois, avant un transfert pour Villejuif, préparer une playlist pour mes derniers instants, s’ouvrant sur “The Asphalt World” de Suede et se terminant, bien sûr, sur “Mortel” de φ, avec, au milieu, le chef d’œuvre de détresse que je joins ci-dessous… Est-ce que je n’ai pas honte, est-ce que je ne me sens pas pathétique à déballer ainsi ma peine et ma rage? Il y a bien sur Facebook des groupes restreints pour s’épancher ainsi… Non, je n’ai ni honte ni ne me sens pathétique. Au point où j’en suis, comme on dit en abrégé — R.A.B., je n’ai plus rien à perdre; tout le monde sait tout ou presque sur moi à travers mon blog et, en outre — je l’ai déjà écrit quelque part — il faut bien que certains (je ne suis sans doute pas le seul sur cette Terre à agir ainsi, je ne veux pas prétendre être le J.C. des bipolaires) le fassent, se “sacrifient” pour que le commun des mortels comprennent ce que c’est que de souffrir d’une maladie psychique. Ah! Michelle Blades, Flora φ, Alexandre Bourit, Nico Lockhart, vous êtes mon dernier grand souvenir artistique en live (parti comme c’est parti, le 30 novembre au soir je serai à une hauteur probabilistique de 99% dans mon lit…), j’aimerais tellement un jour, dans quelques mois, quelques années, une “éternité”, vous recroiser tous les quatre au Pop In ou ailleurs — le Silencio de cet adorable Philippe Poli? Un piquenique sur les pelouses encadrant l’Eglise Saint-Donat d’Arlon? — même si je sais que cela n’arrivera pas car je demeurerai impardonnable pour tout ce qu’il s’est passé après notre dernière rencontre. Mais — plus que tout — Camila Misato Katsuragi, j’aimerais tellement, tellement, lorsque j’aurai assez d’argent, prendre un avion pour le Chili et La Serena, pour te revoir et rencontrer tu pareja y tu niño, ressentir de nouveau cette lumière inouïe, m’inonder dans les reflets de l’Océan Pacifique — e iremos a bailar y carretear a la discoteca de la Vôtre!
Voilà, c’est sorti, tout va mieux, que personne ne m’appelle, c’est l’heure des bonbons et du vrai dodo.
Notons deux choses: (1) j’ai écrit le texte en réussissant à ne pas tagger φ sous son vrai nom; (2) cependant, ma φ-obsession ne se manifeste que lors de mes phases très hautes et très basses — c’est-à-dire assez fréquemment car je cours en vain après l’euthymie depuis presque “toujours” (mon premier diagnostic définitif de bipolarité). Notons une troisième chose: il est 4 heures du matin et je viens de me réveiller au milieu d’un horrible cauchemar en plusieurs séquences (je n’en citerai ici que deux). Dans le texte ci-dessus, si je ne tagge pas φ, je tagge (trois noms successifs en bleu) les membres de son ancien groupe de 2017. Ainsi, dans mon cauchemar, le texte circulait jusqu’à φ; elle venait alors inspecter l’intégralité de mon blog. Un matin, je sortais faible et languissant de mon immeuble et je me retrouvais face à un groupe intimidant de personnes; j’identifiais φ à l’arrière-plan et quelques autres membres de la scène French Pop. φ criait: “je ne vais pas porter plainte, mais on va régler ça à l’ancienne; je n’en peux plus de tes écrits et relais et messages sur les réseaux sociaux.” Je me faisais alors kébabiser la gueule par le groupe entier; φ restait à observer mais, comme pour apposer un point final, une fois que je gisais à terre sanglotant et essuyant mon sang qui coulait de toutes parts, elle venait me fracasser les genoux avec ses talons hauts. “Ce n’est qu’un avertissement”, ajoutait-elle. Séquence alternative: un matin, j’étais tranquillement en train d’émerger chez moi lorsque j’entendais quelqu’un tambouriner à ma porte. Je regardais à travers le judas de la porte: des flics et des infirmiers. Je criais: “que me voulez-vous?!” La réponse était invraisemblablement rapide et directe: “Madame Flora φ a porté plainte contre vous pour harcèlement moral direct et indirect; ne vous inquiétez pas, vous n’irez pas en prison mais serez hospitalisé d’office. Ouvrez immédiatement!” Je m’éloignais de la porte, allumais une cigarette, mettais depuis mon ordinateur la chanson “Mortel” de φ à plein volume pour ne pas entendre les flics en train de commencer à défoncer la porte; j’ouvrais en grand ma fenêtre, tirais la dernière latte de la cigarette, prenais mon élan, et me jetais dans le vide depuis le quatrième étage.
Il est évident que mon activité actuelle sur internet reste totalement innocente; un brin déjantée (voir l’histoire de la playlist dans un précédent article, par exemple), rien de plus. C’est le passé, mon horrible stalking des années 2017–2019, qui me hante, qui — probablement — nous (φ + moi) hante. Les séquences cauchemardesques relatées ci-dessus auraient-elle une probabilité de se produire dans la réalité? Je ne connais plus φ, dans le fond. Ce qui est sûr, c’est que: (1) je vire totalement parano; (2) à choisir entre les deux options, je préfère largement me faire kébabiser la gueule (sans les genoux défoncés, quand même) que terminer hospitalisé d’office.
Quand le passé deviendra-t-il le passé? En émergeant du cauchemar, j’ai saisi mon iPhone, suis allé sur le compte de φ, ai cliqué sur “ne plus suivre”. Et, à l’instant, j’ouvre un nouvel onglet et vais sur Facebook… Je me suis désabonné de la page de φ et ai publié publiquement le message suivant:
Pour raisons de santé, DONNE une place pour le concert de Fishbach à l’Olympia le 30 novembre. Contact par MP. Premier arrivé, premier servi. Envoi immédiat de la place au format PDF. Faire circuler SVP.
*